CHAPITRE 49

Brillant vestige d’une époque plus raffinée, le Club Metropolis occupait le coin d’un magnifique pâté de maisons sur la 68e Rue est, à Manhattan. C’était un grand bâtiment construit à la fin du xixe siècle par McKim, Mead & White et orné de balustrades en pierre de taille et de modillons imbriqués. À l’intérieur, les rampes en fer forgé du double escalier étaient ponctuées de pilastres de marbre et de médaillons de plâtre. En haut des marches, s’ouvrait le Schuyler Hall, une salle gigantesque au sol en damier. On y avait disposé trois cents chaises. Malgré toute son appréhension, Ben devait admettre qu’on n’aurait pu trouver lieu plus approprié pour la cérémonie de souvenir en l’honneur de son père : Marguerite, la fidèle secrétaire qui avait passé vingt ans au service de Max Hartman, avait insisté pour organiser elle-même l’événement et, comme toujours, son travail était au-delà de tout reproche. Ben plissait les yeux pour mieux voir les visages des gens assis devant lui et distinguer les individus perdus au milieu de la foule.

Il y avait là une curieuse assemblée de personnes endeuillées. Ben remarqua les visages tourmentés de quelques vieillards appartenant au milieu des affaires new-yorkais, des hommes grisonnants, voûtés, affligés de bajoues. Ils savaient que la banque, profession à laquelle ils avaient consacré leur vie, était en train de changer. Désormais les compétences techniques prenaient le pas sur les relations personnelles. Leurs plus grosses affaires, ces banquiers les avaient conclues sur les fairways – ces aristocrates adeptes du golf constataient jour après jour que l’avenir appartenait désormais à de jeunes blancs-becs mal coiffés, titulaires de doctorats en ingénierie électrique, des blancs-becs qui ne faisaient même pas la différence entre un putter et un fer 9.

Les présidents des grandes œuvres humanitaires avaient sorti leurs plus beaux atours. Il croisa vaguement le regard de la présidente de la Société historique de New York, une femme aux cheveux épais attachés en un chignon serré ; son visage semblait légèrement étiré, selon une diagonale allant de la commissure des lèvres à l’arrière de l’oreille – séquelles d’un récent lifting pratiqué par un chirurgien malhabile. Dans la rangée derrière elle, était assis un homme aux cheveux blancs, en costume bleu marine. Ben reconnut le patron de la Grolier Society. Le directeur du Metropolitan Muséum, tiré à quatre épingles. La présidente de l’Association d’aide aux sans-logis, une néo-hippie. Les doyens et directeurs de plusieurs grandes écoles avaient choisi d’occuper des places éloignées les unes des autres. Ils contemplaient Ben d’un air sombre. Au premier rang, se tenait le charismatique directeur national de la fondation United Way. Avec ses cheveux légèrement ébouriffés et ses yeux de basset, il avait l’air sincèrement ému.

Tous ces visages se mêlaient devant ses yeux, passant du flou au net. Ben vit des couples mal assortis – femmes athlétiques, hommes bedonnants – qui s’étaient fait une place dans la bonne société new-yorkaise grâce à la générosité de Max Hartman, ce dernier ayant répondu favorablement à leurs incessants appels de fonds, destinés à financer leurs diverses associations : pour la littérature, contre le sida, pour la liberté d’expression, la préservation de la nature. Il remarqua ses voisins de Bedford : un grand patron de presse adepte du soft-bail, toujours vêtu de sa fameuse chemise rayée ; le visage interminable du descendant défraîchi d’une grande famille qui avait autrefois dirigé un programme d’égyptologie dans une université de l’Ivy League ; un homme encore jeune qui avait créé puis vendu à un conglomérat une compagnie fabriquant des infusions aux plantes affublées de noms colorés style New Age et dont les couvercles servaient de support à des sermons progressistes.

Des visages ravagés, des mines fraîches, des familiers, des inconnus. Il y avait les salariés de Hartman Capital Management. Les bons clients, comme ce brave Fred McCallan qui avait épongé ses yeux avec un mouchoir, une ou deux fois. D’anciens collègues de Ben, à l’époque où il enseignait dans l’East New York ; ses nouveaux collègues, puisqu’il travaillait maintenant dans une école tout aussi déshéritée, au Mont Vermont. Il y avait là des gens qui les avaient aidés à traverser une période difficile, Anna et lui. Et par-dessus tout, il y avait Anna, sa fiancée, son amie, son amante.

Ben leur faisait face, debout sur la tribune surélevée qu’on avait installée au fond de la salle. Il était censé prononcer quelques paroles à la mémoire de son père. Une heure auparavant, un excellent quatuor à cordes – sponsorisé par Max Hartman – avait interprété un adagietto de Mahler, tiré de la Cinquième Symphonie. D’anciens partenaires d’affaires et des représentants d’associations subventionnées par Max étaient venus évoquer le parcours du défunt. À présent, c’était au tour de Ben. Tout en parlant, il se demandait s’il s’adressait vraiment à l’assemblée ou bien à lui-même.

Il devait parler du Max Hartman que lui connaissait, pour autant qu’il ait jamais pu le connaître. Il savait seulement que tel était son devoir. Il déglutit avant de poursuivre : « Un enfant voit son père comme être tout-puissant. Il remarque la fierté qui l’anime, ses larges épaules, sa maîtrise, sans penser une seconde que cette force possède ses limites. Puis on grandit et on s’aperçoit qu’on s’est trompé. Cette découverte est peut-être le signe de la maturité. » La gorge de Ben se serra et il dut attendre quelques instants avant de reprendre.

« Mon père était un homme solide, l’homme le plus solide que j’aie jamais connu. Mais le monde est puissant, lui aussi, plus puissant que n’importe quel individu, si courageux et déterminé soit-il. Max Hartman a vécu les années les plus sombres du XXe siècle. Il a traversé une époque durant laquelle l’humanité a révélé la noirceur de son cœur. Je crois qu’il s’est senti sali par cette triste réalité. Je sais qu’il lui a fallu vivre avec, bâtir une vie, fonder une famille et prier pour que cette horreur n’entache pas nos existences comme elle avait entaché la sienne. Quand on a approché le mal, il vous poursuit à jamais. » De nouveau, Ben fit une pause, prit une profonde inspiration et poursuivit.

« Mon père était un homme compliqué, le plus compliqué qu’il m’ait été donné de connaître. Il a vécu durant une période historique d’une, extraordinaire complexité. Un poète a écrit :

Songe un peu

Combien l’histoire connaît de chausse-trappes, de chemins détournés,

De fausses issues, elle nous murmure des rêves fous

Nous mène par la vanité.

« Mon père aimait à répéter que seul l’avenir l’intéressait. C’était un mensonge, un pieux mensonge, une sorte de provocation. C’est bien l’histoire qui a formé mon père et c’est cette même histoire qu’il a toujours combattue dans l’espoir de la vaincre. Une histoire qui n’était pas écrite noir sur blanc. Le regard d’un enfant est très aiguisé. Il se trouble avec l’âge. Et pourtant il y a quelque chose que les enfants ont du mal à percevoir : les tons intermédiaires. Les nuances de gris. La jeunesse a le cœur pur, n’est-ce pas ? La jeunesse refuse les compromis, elle est sûre d’elle-même, enthousiaste. C’est le privilège de l’innocence. C’est le privilège de l’intégrité morale préservée des affres de la réalité.

« Et si vous n’aviez d’autre choix que de pactiser avec le mal afin de le combattre ? Sauveriez-vous ceux que vous aimez, ceux que vous pouvez sauver, ou refuseriez-vous tout compromis ? Personnellement, je ne me suis jamais trouvé devant un tel dilemme. Mais il y a une chose que je sais. Les mains d’un héros sont gercées, éraflées, usées, calleuses et rarement propres. Celles de mon père ne l’étaient pas. Il a vécu avec le sentiment d’avoir servi les desseins de l’ennemi tout en le combattant. À la fin, ses larges épaules pliaient sous le poids de la culpabilité, une culpabilité qu’aucune de ses bonnes actions ne pourrait jamais effacer. Il était incapable d’oublier le passé. Des êtres qu’il avait aimés étaient morts, alors que lui avait survécu. Je vous le répète : quand on a approché le mal, il vous poursuit à jamais. Il a donc redoublé d’efforts en faveur du bien. En croyant me rebeller contre lui et ce qu’il voulait faire de ma vie, je lui étais d’autant plus fidèle, à lui et à sa mission. C’est une chose que j’ai mis du temps à comprendre. Un père désire avant tout assurer la sécurité de ses enfants. Mais aucun père n’en a les moyens. »

Les yeux de Ben rencontrèrent ceux d’Anna. Ils se regardèrent longuement. Ben puisa du réconfort dans ce regard ferme et expressif, dans la limpidité de ces yeux noisette.

« Un jour, si Dieu veut, je serai père à mon tour, et je suis sûr que j’oublierai cette leçon et que je devrai la réapprendre. Max Hartman était un philanthrope – dans le sens premier du terme, il aimait les gens – et pourtant ce n’était pas un homme facile à aimer. Il ne se passait pas un jour sans que ses enfants se demandent s’il était fier ou s’il avait honte d’eux. À présent, je sais que lui aussi se posait cette question : nous, ses enfants, étions-nous fiers ou honteux de l’avoir pour père ?

« Peter, tu me manques plus que quiconque et j’aimerais que tu sois ici en ce moment même, pour entendre ce que je dis et prendre toi aussi la parole. » Les larmes lui montaient aux yeux.

« Peter, mes paroles sont à classer dans la rubrique "incroyable mais vrai", selon ton expression favorite. Papa vivait dans la crainte de notre jugement. » Ben pencha la tête un instant. « J’affirme que mon père a vécu dans la crainte que je le juge – bien que cela semble incroyable. Il craignait qu’un enfant élevé dans le luxe et l’insouciance se permette de mal juger un homme ayant vu disparaître tout ce qui lui était cher. »

Ben redressa les épaules et, d’une voix rauque et pleine de tristesse, haussa un peu le ton.

« Il a vécu dans la peur que je le juge. Et c’est ce que je fais. Je le juge mortel. Je le juge imparfait. Je le juge comme un homme entêté, compliqué, difficile à aimer et à jamais marqué par une histoire qui a laissé son empreinte sur tout ce qu’elle a touché. « Et je le juge comme un héros. « Je le juge comme un brave homme. « Et parce qu’il était difficile à aimer, je l’en ai aimé davantage… »

Ben s’arrêta, les mots s’étranglaient dans sa gorge. Il ne pouvait plus rien dire. Mais peut-être n’y avait-il plus rien à dire. Il contempla le visage d’Anna, ses joues brillantes de larmes. Elle pleurait pour eux deux. Il s’éloigna lentement de la tribune et se dirigea vers le fond de la salle où Anna le rejoignit bientôt. Elle resta à ses côtés pendant que les innombrables invités passaient devant lui en file indienne pour lui serrer la main, après avoir attendu et discuté entre eux dans la pièce voisine. Furent prononcées des paroles de condoléances, de sympathie. Des vieillards lui serrèrent amicalement l’épaule ; pour eux, il était toujours le jeune Hartman, l’un de ces deux adorables jumeaux. Ben reprenait contenance. Il était vidé, mais dans ce vide qu’il ressentait au fond de lui, la douleur elle-même avait presque disparu.

Dix minutes plus tard, lorsque l’un des invités – le directeur du service fiscal de HCM – raconta une anecdote amusante et affectueuse à propos de son père, Ben se mit à rire très fort. Cela faisait des semaines, peut-être des années, qu’il ne s’était senti aussi léger. La foule s’éclaircissait. Un homme de haute taille, à la mâchoire carrée et aux cheveux clairs, lui serra la main.

« Nous n’avons jamais été présentés, dit-il en lançant un coup d’œil à Anna.

– Ben, j’aimerais te présenter un de nos très bons amis, annonça Anna d’une voix chaleureuse. Voici le nouveau directeur de l’Internai Compliance Unit, auprès du ministère de la Justice – David Denneen. »

Ben lui serra vigoureusement la main.

« J’ai beaucoup entendu parler de vous, fit-il. Puis-je vous remercier de nous avoir sauvé la mise ? Ou cela fait-il seulement partie de vos attributions ? » Ben savait que Denneen avait tout fait pour qu’on réhabilite Anna ; il avait savamment laissé se répandre la rumeur que la jeune femme avait été envoyée sur une mission tordue et que les rapports faisant état de ses exactions étaient des faux destinés à débusquer les véritables malfaiteurs. Anna avait même reçu une lettre officielle du gouvernement la remerciant de ses « bons et loyaux services », tout en laissant discrètement de côté les circonstances dans lesquelles elle les avait rendus.

Pourtant, ce papier lui permit de se faire embaucher comme vice-présidente chez Knapp Incorporated où elle était à présent responsable de la lutte contre les risques.

Denneen se pencha et embrassa Anna sur la joue.

« Mais je suis toujours en dette, dit-il en se retournant vers Ben. Et vous le savez pertinemment. De toute façon, en ce moment à l’ICU, je suis en train de réduire les effectifs. Si un jour, ma mère me demande ce que je fais dans la vie, j’aimerais pouvoir lui répondre.

– Ben ? » Anna désigna le petit homme à la peau brune qui accompagnait Denneen.

« Encore un ami cher que je souhaiterais te présenter : Ramon Perez. »

Une autre vigoureuse poignée de main. Ramon sourit de toutes ses dents éclatantes.

« C’est un honneur », dit-il en inclinant légèrement la tête.

Il souriait toujours lorsque Anna l’entraîna dans un coin pour discuter.

« Tu as l’air du chat qui vient de manger le canari, dit Anna. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’y a-t-il de tellement drôle ? » Ses yeux pétillaient de gaieté.

Ramon se contenta de secouer la tête. Il jeta un coup d’œil vers Ben, de l’autre côté de la pièce, puis la regarda de nouveau, sans cesser de sourire.

« Ah, s’exclama-t-elle enfin. Je sais ce que tu penses. "Quel gâchis", c’est ça ? »

Ramon haussa les épaules sans la contredire.

Anna fixa Ben jusqu’à ce que leurs yeux se croisent.

« Eh bien, laisse-moi te dire une chose, fit-elle. Il n’est pas perdu pour tout le monde. »

Ensuite, Ben et Anna s’avancèrent vers la Lincoln Town Car d’HCM qui les attendait devant le Metropolis ; le chauffeur, les voyant apparaître, se mit presque au garde-à-vous devant la voiture, prêt à ouvrir la portière arrière. Ben prit doucement la main d’Anna dans la sienne. Une fine bruine faisait luire les rues assombries par le crépuscule.

Ben sentit une montée d’adrénaline : le chauffeur semblait curieusement jeune, presque adolescent, et pourtant bâti en force. Une foule d’images surgirent dans son esprit, comme un kaléidoscope cauchemardesque. Des images venues d’un proche passé. Ben étreignit la main d’Anna.

Lorsque le jeune homme se tourna vers Ben, les fenêtres éclairées du Metropolis révélèrent son visage. C’était Gianni, le chauffeur qui était resté au service de Max au cours des deux dernières années de sa vie. Un type à la physionomie enfantine accentuée par ses dents écartées et son entrain. Gianni souleva sa casquette couleur souris et l’agita.

« Mister Hartman », lança-t-il.

Ben et Anna montèrent dans la voiture ; Gianni referma la portière en parfait professionnel, avant de s’installer au volant.

« Où allons-nous, Mister Hartman ? » demanda Gianni.

Ben consulta sa montre. La nuit ne faisait que commencer et demain il n’y avait pas classe. Il se tourna vers Anna.

« Où allons-nous, Miss Navarro ? demanda Ben.

– N’importe où, dit-elle. Tant que nous y allons ensemble. » Sa main se glissa dans la sienne et elle posa sa tête sur son épaule.

Ben respira profondément. Il se laissa envahir par la tiédeur du visage d’Anna tout près du sien. Et enfin ressentit la paix. C’était un sentiment étrange et inhabituel.

« Contentez-vous de rouler, répondit Ben. D’accord Gianni ? Allez n’importe où, nulle part – roulez, c’est tout. »

Le protocole Sigma
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